[Avignon OFF] Les Vibrants d’Aïda Asgharzadeh

Eugène, aussi beau qu’insolent, est engagé volontaire. 1916 : il est blessé à Verdun et y laisse la moitié de son visage. S’ensuit alors une irrépressible descente aux enfers : comment continuer à vivre lorsque le miroir nous donne à voir les restes de ce qui a été et ne sera plus ?
Au Val-de-Grâce où il est hospitalisé, Eugène va rencontrer les architectes de sa nouvelle vie dont la grande Sarah Bernhardt. Il va alors suivre les pas, ou plutôt l’ombre, d’un certain Cyrano de Bergerac…

La pièce est construite comme une épopée, les tableaux se succèdent dans une scénographie époustouflante où les jeux de rideaux en tulle de mariage, en voile de bateau ou en gaze d’infirmerie, c’est selon, nous font voyager de la place Collette au Val de Grace, de Belle Île en Mer à Verdun. Le très beau texte d’Aïda Asgharzadeh, est servi par une mise en scène à la hauteur du propos et par un jeu d’acteurs épatant.

Dans cette épopée optimiste vers le dépassement de soi, le héros traversera, et nous avec lui, la difficile question de la confrontation entre le réel et le semblant, entre la réalité médicale et la fiction guérissante d’une Sarah Bernhardt reine de l’affabulation. Débat entre les mots et le corps, thème brûlant au théâtre. Se pose aussi à nous la limite du soin dans ce qu’il peut devenir une manipulation. L’infirmière ( Aida Asghrazadeh est aussi une grande actrice) comme Sarah Bernhardt dans leur commune et radicale envie de sauver Eugéne, approchent souvent une influence suggestive qui tient de la manœuvre et d’une dangereuse et paradoxale annulation d’Eugène en tant que personne.

Mais Eugène saura se défendre, et ce combat dans cette mise en scène admirable mérite d’intégrer l’agenda du festivalier.

 


Interprète(s) : Aïda Asgharzadeh, Benjamin Brenière, Matthieu Hornuss, Amélie Manet
Mise en scène : Quentin Defalt
Collaboration artistique : Damir Žiško
Lumières : Manuel Desfeux
Scénographie : Natacha Le Guen de Kerneizon
Costumes : Marion Rebmann
Compositeur : Stéphane Corbin
Création sonore et régie : Ludovic Champagne
Masques : Chloé Cassagnes