« Meute » de Julie Guichard, débordée par le thème de la réinsertion au TNP-Villeurbanne

Le sujet est délicat. Avec MeutePerrine Gérard dans une mise en scène Julie Guichard raconte une histoire d’expiation et de vengeance violente et absurde au Théâtre National Populaire de Villeurbanne.

 

 

 

Après avoir purgé une peine de dix ans pour l’incendie criminel dans lequel deux personnes sont mortes, Damien Lefèvre rentre chez lui, dans la petite ville qui a vécu les faits. Personne n’a oublié son crime et par une main invisible qui se nomme vengeance la ville ne cessera de le persécuter au travers de sa police, des médias, des tribunaux, du Parlement même. Le désir de vengeance, comme le résidu inexpugnable d’une justice mal comprise, refuse d’éteindre la faute et va conduire au pire.

Les six comédiens interprètent avec dynamisme et enthousiasme l’ensemble des protagonistes. Ils alternent les scènes, traversent le plateau à toute vitesse, changent les décors.  C’est un bonheur de découvrir une belle troupe talentueuse et cohérente. La meute émerge sous nos yeux. 

Le texte est le fruit d’une résidence de la troupe au TNP. Il a nécessité un vrai travail d’enquête fait de rencontres avec des magistrats, d’anciens surveillants de prison et des psychologues. L’auteure Perrine Gérard et la metteuse en scène Julie Guichard dissèquent  la réalité de l’après-prison. En même temps elles repèrent comment un  groupe de citoyens inapaisés par les dix ans de prison du criminel,  opère pour réassigner celui-ci à une place définitive , celle de l’éternel coupable. Plus la tension monte et plus ce criminel patenté devient le bouc émissaire; il cristallise les fautes de l’ensemble du bourg en vue de les expier.

 Il ne s’agit pas d’un documentaire, mais d’un véritable roman. Le travail sur le texte est riche. Les gesticulations et l’affolement qui saisissent les habitants sont décrits dans une fiction qui sert le propos. Des oiseaux morts chutent des cintres; une neige incessante, fruit d’un dérèglement climatique rappellent aux hommes leur petitesse devant une instance supérieure qui les recouvrent en les méprisant. Nous sommes entre la tragédie grecque et la parabole christique. La pièce est innovante et brillante; le sujet toutefois a malheureusement dépassé ces auteures. Plusieurs scènes sont magnifiques, par le minimalisme de la scénographie, la puissance des dialogues  et le brio des comédiens. Mais l’ensemble ne parvient pas à retenir notre concentration. La pièce trop longue manque de rythmeS. Deux temporalités enchâssées auraient conféré une épaisseur. On s’ennuie un peu devant ce spectacle souvent passionnant mais qui , par son manque de rythmes, reste plat.

 

MEUTE

23 janvier – 8 février 2019
de Perrine Gérard / mise en scène Julie Guichard
Durée : 2h30 environ — Résidence de création
Petit théâtre, salle Jean-Bouise

Photos copyright Michel Cavalca

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